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BILAN

Il est temps pour moi de conclure ce blog, de dresser un bilan, presque un an après cette merveilleuse expérience... 
En une phrase, j'encourage tou(te)s les passionné(e)s de montagne un peu expérimenté(e)s à se lancer à leur tour !

Les détails de ce bilan, avec quelques informations pratiques/questions techniques complémentaires : 

La HRP, pour qui ?

Il serait inconscient de ma part de dire que ce trek est à la portée de tous. Étant donné que la traversée se déroule parfois sur sentier non balisé voire hors sentier, elle s'adresse aux randonneurs ayant l'expérience du terrain "montagne", avec un bon sens de l'orientation, et sachant passer des difficultés techniques comme des éboulis, pentes raides ou des névés. Même si la technique pose peut-être plus de difficulté que le physique en lui-même, une assez bonne condition physique est bien sûr nécessaire.
Côté matériel, il est difficile de se passer de piolet et/ou crampons, à moins de shunter le col de la Literole et de faire la traversée en juillet-août comme je l'ai fait. A moduler selon les conditions d'enneigement de l'année.


GR10 ou HRP ?

Le GR10 est plus accessible au plus grand nombre, car il ne présente pas toutes les difficultés techniques de la HRP, et c'est un sentier toujours bien balisé. Cependant, la distance et le dénivelé totaux sont plus importants.
Pour ma part, je n'ai aucun regret d'avoir choisi la HRP plutôt que le GR. Pendant mon passage sur le GR, j'étais en manque de haute altitude, de panoramas bluffants, de nature sauvage, de silence absolu... Parcourir les crêtes était vraiment génial. La vue était magnifique et je préférais cela aux forêts présentes plus bas sur le GR, bien qu'elle soient pleines de charme.


Matériel, couchage, nourriture : quel bilan ?

Pour le détail du matériel que j'ai emporté, se reporter à la page dédiée. 
Je crois que la seule chose que j'ai oublié de prendre et qui avait son utilité, c'était un gant de toilette. J'ai dû m'en faire prêter à Ayous lorsqu'il faisait très froid et qu'il n'y avait plus d'eau chaude pendant plus de deux jours. J'ai pu tenir deux jours sale et "puante", mais pas trois !
 
Au final, je suis satisfaite de mon choix de dormir en refuge pour ne pas porter trop de poids. Ainsi, je n'ai emporté qu'un sac à viande. Cela a suffit même dans les refuges non gardés car il y avait des matelas et des couvertures, sauf à l'abri d'Ardané où il manquait les couvertures. Je m'en suis quand même très bien sortie grâce à la couverture de survie.
J'ai très bien dormi dans les refuges, et pas très bien en tente avec mon mince tapis de sol lorsque j'ai bivouaqué en Andorre.
Mes chaussures étaient sans doute un peu souples pour une HRP et se sont bien usées, mais je n'ai pas eu de problème.  
Je ne regrette pas d'avoir emporté mon appareil photo bridge, son poids était compensé par le "faible" poids total de mon sac (entre 7 et 13 kg).
 
Côté nourriture, je rappelle que j'ai alterné dîners en refuge et repas au réchaud, j'ai pris les paniers pique-nique à chaque refuge, et les petit-déjeuners venaient de mon sac la plupart du temps.
Si c'était à refaire je ne reprendrai pas de nouilles chinoises. Certes, elles cuisent rapidement mais les portions individuelles apportent beaucoup trop peu de calories. De même, les portions individuelles de purée lyophilisée ne me suffisaient pas. Mieux vaut miser sur la semoule, les pâtes pour bouillon, les lentilles corail (pour les protéines), et prendre des sachets plus grands de purée. Les repas tout prêts lyophilisés étaient plutôt bons et assez copieux. Il existe également des versions XXL qui sont intéressantes je pense pour les personnes plus corpulentes que moi (autrement dit tout le monde X) ) !  Plus sérieusement, je dirais à partir de 65 kg ?)
Les petit-déjeuners à base de muesli (bien formulé : quaker noix de pécan et noix du Brésil) et de lait en poudre étaient très bien. Les soupes lyophilisées étaient appréciables. Les casse-croûtes de fruits secs, barres énergétiques, chocolat, fromage, et saucisson étaient une bonne idée. Je n'ai pas manqué de nourriture "plaisir", il faut bien penser à en avoir pour un long trek comme celui-là.
Les dîners en refuge étaient copieux et délicieux. Les paniers pique-nique très satisfaisants, mais le pain espagnol est mauvais ! ^^


Le refuge du Mont Roig

Et la météo ?

Je crois qu'on peut dire que j'ai été chanceuse globalement niveau conditions météo. J'ai été un peu surprise par le nombre d'orages matinaux (3), mais je n'ai été trempée qu'une ou deux fois sur toute la traversée, les autre fois j'ai pu m'abriter le temps que ça passe, mais surtout il a globalement fait très beau !
Je compte 27 jours de très beau temps, 7 mitigés, 6 nuageux ou de brouillard et 5 avec des précipitations. Plutôt bien non ? Côté températures, j'ai rarement souffert de la chaleur, et il a fait très froid pendant 2-3 jours. Le reste du temps, c'était bien !
A noter que le Pays Basque a été fidèle à sa réputation et m'a offert un peu de brouillard.


Nomadisme, solitude : forme mentale

Comment vit-on mentalement une expérience sportive de pleine nature de 7 semaines, telle que la HRP ?
Pour ma part, les moments difficiles ont été très très rares, et dus uniquement aux intempéries ou aux difficultés techniques.
Je n'étais pas vraiment habituée à marcher seule, mais je l'ai bien vécu dans la mesure où je retrouvais du monde le soir en refuge. En journée en revanche, je ne croisais que très peu de monde. En marchant seule, je me sentais plus en communion avec la nature, tout comme avec moi-même. C'est très apaisant de se laisser perdre dans ses pensées, sans forcément "méditer". 
Mais ce que j'ai ressenti de plus fort, c'était la découverte du nomadisme. Tout le corps et l'esprit finissent par s'y accoutumer, le nomadisme devient la normalité, il rythme le quotidien. Le cerveau devient accro ! Quel bonheur de marcher chaque jour vers une nouvelle destination, de se fixer de nouveaux objectifs... Ne rien laisser derrière soi si ce n'est de beaux souvenirs. Marcher, chaque jour ou presque, ne rien faire d'autre : c'était le pied !


Forme physique avant, pendant, après

Avant de partir, j'étais en très bonne condition physique : j'ai toujours été sportive et je pratique la course à pied. Au printemps, je m'étais particulièrement entraînée à la course pour une compétition, puis j'avais fait 2 randonnées en Ariège, en solo, pour me préparer un peu à la HRP. J'avais fait la rando de l'étang d'Artax et le Pic St-Barthélémy.
Je n'étais cependant pas vraiment habituée à porter un sac lourd. 
Niveau corpulence, je pesais 44kg (pour 1m55) : déjà pas bien épaisse !

Les 5 premiers jours de la traversée, j'ai eu mal aux pieds. Pas d'ampoules (je n'en ai eu que pour les deux randos de préparation, et je n'ai même pas trop utilisé de crème nox !) mais la sensation d'écrasement au niveau de la plante. Les points d'appui du sac à dos me faisaient mal également. Peu à peu, ces douleurs ont disparu, surtout celles des pieds. Il suffit d'attendre qu'ils fassent de la corne, c'est pour ça que je ne suis pas convaincue après coup par la solution nox !
Les muscles des jambes étaient également bien meurtris les premiers jours mais cela s'est vite estompé.
Le corps s'est accoutumé à l'altitude et j'ai pu porter une grosse charge en Andorre pour soulager ma mère, au bout de 10 jours. De manière générale, le corps a toujours "suivi" dans cette aventure.
Après les passages compliqués en devers en Andorre, j'ai eu une gêne à la cheville et au pied : l'appui me faisait mal en me levant le matin puis je ne le sentais plus vraiment. En fait j'avais la cheville tordue, mais sans entorse. J'ai marché sans problème pendant 19 étapes jusqu'à ce que ma mère ostéo me la remette en place !
En réalisant des enjambées trop grandes et trop énergiques en terrain caillouteux, j'avais ressenti comme une sorte d'élongation à l'arrière du genou dans le Néouvielle. Après les deux très courtes étapes qui ont suivi, je n'avais plus de problème.
A la 20e étape, j'ai ressenti des contractures dans les ischio-jambiers, qui avaient disparu le lendemain après la prise de gélule de magnésium.
J'ai été malade une nuit sans trop savoir pourquoi, j'ai eu très mal au ventre, sans doute une indigestion. Après une nuit et des médicaments, je suis repartie, affaiblie, mais la forme est revenue dans la journée.

Dès la 12e étape, je me suis trouvée très amaigrie : côtes saillantes, cuisses toutes fines... J'avais pourtant l'impression de manger à ma faim. Avec le recul, je pense que mes repas principaux étaient assez caloriques, mais qu'il fallait compenser avec plus d'en-cas encore, car le corps dépense de l'énergie pendant des heures et des heures.
Je n'ai pas de balance et n'ai donc jamais su combien de kilos j'avais perdus, mais sur quelques photos on voit bien que les cuisses sont beaucoup trop maigres par rapport aux mollets qui, eux, peut-être, avaient gagné en muscle. En partant de 44kg, j'étais peut-être passée à 41 ?? Mystère... En tout cas je me suis bien fait plaisir par la suite !

Depuis le Montcalm

Meilleurs souvenirs, étapes préférées

  • Mes meilleurs souvenirs sont la 5e étape, durant laquelle j'ai assisté avec un compagnon de route à un merveilleux lever de soleil, sur une mer de nuage, depuis les crêtes, et qui s'est terminée avec l'observation du gypaète barbu et de son os, à côté du très chouette refuge de Mariailles. 
  • L'arrivée au col de Mulleres (étape 22) fut un grand moment durant cette traversée. La vue était grandiose, lunaire, désertique, et je me trouvais alors face à l'Aneto, le plus haut sommet de la chaîne. Comme si le symbole ne suffisait pas, ce moment représentait en plus la moitié de ma traversée en nombre d'étapes.
  • Une des zones que j'ai préférées était entre Gavarnie et Arrémoulit. La montagne y était pleine de couleurs, très sauvage côté espagnol, il y a eu le passage autour du Vignemale... J'aurais très certainement adoré aussi la zone de l'Aneto à Gavarnie mais je n'ai pas emprunté la HRP sur ce tronçon-là. 
 
Les rares galères ou frayeurs 

Si je repense à des moments difficiles, seuls trois me viennent en tête :
  • L'étape très technique entre Sorteny et Fourcat (étape 11), en Andorre, avec éboulis, pentes très raides, dévers, et chaos. C'était faisable physiquement, mais très éprouvant mentalement. Préférer la variante par El Serrat. 
  • Les 4h d'orage et de pluie non-stop au pied du Mont Roig (étape 17), où je ne pouvais pas m'abriter et où je ne savais plus par où aller. Il pleuvait trop pour consulter mon portable ou la carte et j'ai dû attendre, impuissante, que ça s'arrête.
  • Le passage du col de Letrero (étape 32), où je perdais toute adhérence dans un goulet très raide et où j'ai cru que j'allais dévaler la pente avec les rochers ! Après coup, j'étais fière d'avoir passé cette épreuve.


Goulet raide caillasse Letrero
Le goulet très raide du col de Letrero


Des regrets ?

En premier lieu je dis toujours que je n'ai aucun regret concernant cette traversée. Le choix du parcours, du matériel, la décision de m'être lancée dans l'aventure...
Mais en réfléchissant un peu, je dirais quand même que je regrette un petit peu une chose : c'est de n'avoir pas pris en photo tous les gens sympa avec qui j'ai sympathisé dans les refuges, et sur les sentiers. Ils font aussi partie de mon aventure et n'ont pas eu leur place dans mon appareil photo, tout simplement parce que je n'avais pas le réflexe !

Classement des plus belles étapes

Juste pour le fun, et pour satisfaire les curieux, j'ai tenté d'établir mon classement des étapes de cette traversée, selon leur beauté, leur intérêt. Je n'ai donc pas tenu compte de mon état d'esprit ni de la météo lors des étapes, ni des difficultés techniques (dans une moindre mesure). 

Étapes spectaculaires, grandioses, magnifiques (★★★★★) :

Étape 1 : Banyuls - Col de l'Ouillat

"Tramontane"

ARP Banyuls
Prêt, feu, go !

Presque 20 ans que je viens marcher tous les étés dans les Pyrénées, du coté de la Cerdagne et du Capcir. Depuis tout ce temps, avec la famille, l'idée de la traversée des Pyrénées a été évoquée, comme une idée de projet à long terme, sans plus de précisions. Comme un rêve... Après 6 ans d'études supérieures, pas de boulot à la sortie malgré quelques recherches, je réfléchis à une manière de marquer le coup. De profiter du laps de temps qui m'est offert avant de me lancer dans le monde du travail pour de bon. L'idée ressurgit, comme une évidence. Mais oui, c'est maintenant qu'il faut partir traverser la chaîne ! Je peux partir une quarantaine de jours en vacances sans problème. Bon, il est vrai que personne dans mon entourage n'est à la fois dispo 40 jours et assez fou de montagne pour m'accompagner tout du long. Mais mes parents viendront marcher chacun une semaine environ avec moi. En trois semaines d'intenses recherches, je suis prête à partir, dès le lendemain de la remise des diplômes. Direction Banyuls pour démarrer cette traversée dans le sens est-ouest. 

2 juillet 2017 : ça y est, c'est le grand jour ! Il est temps de s'élancer à l'assaut de la chaîne. Après une nuit à l'Hôtel Canal de Banyuls-sur-mer, je pars avec environ 13 kg sur mon dos (estimation), soit presque 30% de mon poids ! La tramontane est puissante aujourd'hui, cela risque d'être pénible sur les crêtes. 

Panneau du GR10 à BanyulsRace albère et vue sur Banyuls



La mer depuis la crête
La mer depuis les hauteurs...

En montant à travers les vignes, je découvre peu à peu les paysages de basse montagne typiquement méditerranéens, avec les arbres et les oiseaux qui leur sont associés... C'est ainsi que, parmi les chênes verts, je fais ma première observation de pie-grièche grise ! La passionnée d'ornithologie que je suis est ravie. Puis rapidement la vue se dégage sur la mer, et on aperçoit Banyuls au loin. En prenant de l'altitude, je me fais chahuter violemment par les rafales de vent. Je manque même de chuter en arrière sur un rocher! Le col des Gascons est particulièrement éprouvant à parcourir. 
Je croise pas mal de randonneurs, et un troupeau de jolies vaches dont je ne connaissais pas la race : il s'agit de l'albère, du nom du massif que je suis en train de parcourir, mais également appelée massanenque côté français. Une race très locale donc, les effectifs sont estimés à environ 200 têtes !
J'arrive au Coll del Pal à 12h30. Postée derrière un grand buisson, je parviens à pique-niquer à l'abri du vent. En plaine, côté français, j'aperçois un incendie, attisé par cette satanée tramontane...

La crête frontière dans les Albères
La crête frontière qu'il faut parcourir
En marchant, je me dis que ce que je viens de parcourir ne représente qu'une infime partie du long voyage qui m'attend. J'ai beau avoir maintenant un pied dedans, cette aventure me semble encore bien irréelle. Il faut poursuivre sur la crête frontière, en plein vent, mais avec la plus belle vue possible... 
Un passage dans une belle hêtraie du massif de l'Albère permet de changer un peu de décor et de moins subir le vent.
Une dernière grimpette au Pic Neulos, une dernière descente le long de la frontière puis en forêt, et me voilà arrivée !
A la fin, je n'ai pas vu le temps passer et pourtant... J'ai marché 8h30 aujourd'hui ! J'ai seulement eu mal aux pieds durant les deux dernières heures. Je suis donc soulagée en arrivant au chalet de l'Albère, où l'accueil est chaleureux. Je rencontre un randonneur qui termine sa traversée, et qui est très content de me donner le surplus de ses paniers pique-nique ! Il me souhaite autant de chance que lui dans ma traversée qui commence...

Étape 2 : Col de l'Ouillat - Las Illas

"Détour imprévu"



Patrimoine catalan avant le Perthus
Au col de la Comtessa
Après ma première nuit en refuge, très confortable, je réalise avec soulagement que j'ai déjà récupéré de la veille, mes membres ne sont pas endoloris. 
Simplement des zones d'appui du sac à dos un peu douloureuses. 
Me voilà donc motivée et optimiste au possible !
Je reprends donc ma route en commençant par une descente par un joli sentier dans la forêt de châtaigniers. 


Canigou
Le massif du Canigou apparaît !
Je croise un randonneur en arrivant en bas, ce sera le seul de la journée, en dehors du passage au Perthus. Je suis pourtant sur le GR10 pour le moment, puisque la HRP y passe au début de la chaîne...

Au Perthus donc, un bref retour à la civilisation, j'en profite pour acheter un sandwich et repars dans la chaleur. Les températures ne sont ni caniculaires ni exceptionnelles mais je me trouve à basse altitude (280m) et nous sommes le 3 juillet...




Ruines de panissars au-dessus du Perthus
Redoute de Panissars
Je constate avec amertume qu'aujourd'hui, c'est après 2h de marche seulement que mes pieds deviennent douloureux... Pas d'ampoules mais une sensation d'écrasement de la plante très pénible. Le sentier laisse place à une piste qui monte doucement. J'ai chaud et constamment soif, et il n'y a aucun point de vue ici pour me motiver.
Un pick-up arrive à ma hauteur et deux hommes qui semblent être des employés de la commune, ou quelque chose du genre, me demandent si je vais bien et si je veux qu'ils m'avancent. Je vais quand même relativement bien et ne veux surtout pas "tricher", qui plus est durant une étape si facile ! Je les remercie donc et repars en serrant les dents.






Aux alentours du Perthus
Ruines de Panissars et Fort de Bellegarde
Le temps passe et je ne comprends pas pourquoi je ne suis toujours pas arrivée à Las Illas. Le livre mentionne un raccourci que j'ai dû rater, puisque je suis restée sur le GR. Me voilà donc sur le bitume, assoiffée (mes réserves s'étant épuisées) épuisée et souffrant des pieds. Mais la carte indique que je devrais être plus proche, même en étant restée sur le GR10. En fait, j'apprendrai plus tard que 2 km se sont ajoutés au tracé initial du GR, car une propriétaire l'a fait détourner. "Merci", sorcière va... Je me résous à faire du stop et ne trouve un chauffeur qu'à 300m de mon arrivée. Dure journée ! Je rencontre alors une traileuse de mon âge qui fait la traversée en faisant 2 étapes d'un coup. Et son sac n'est pas si léger (9-10 kg selon elle). Je suis impressionnée.

Étape 3 : Las Illas - Amélie-les-Bains

"Parcours ombragé"



HRP salinas
En marchant côté espagnol
Je repars du gîte de l'hôtel des Trabucayres, où j'ai cuisiné et dormi seule. Le sentier monte en forêt plein sud, et va me mener pendant un moment versant nord, en Espagne. J'ai donc quitté brièvement le GR10 pour suivre la HRP seule. Je trouve avec étonnement une piste bétonnée, qui monte doucement pour arriver dans une pinède sylvestre, qui ressemble plus aux lieux où j'ai l'habitude de randonner. Cela fait déjà plus "montagnard". J'arrive ensuite à l'ermitage des Salinas, où une jolie fontaine me permet de me ravitailler en eau. J'aperçois un maçon qui s'affaire autour de l'ermitage, c'est la première personne que je croise aujourd'hui ! Le début de l'itinéraire est très peu fréquenté.


Fontaine HRP Salinas
La fontaine de l'ermitage
La forêt continue et j'avale assez rapidement tout le dénivelé. Je recroise le GR10 au col du puits de la neige (de nombreux puits à neige étaient autrefois utilisés dans la région, pour la fabrication de pains de glace à redescendre en plaine). C'est une grande intersection entre un PR, le GR10 et la HRP qui restent séparés. Je dois suivre de près la crête frontière et le balisage jaune. Au début, il est doublé du balisage rouge et blanc du GR, mais je ne vois bientôt plus que celui du GR. Dans les arbres, j'ai manqué la séparation des deux sentiers et laissé la HRP partir quelque part au-dessus de moi.

GR10 Roc Frausa
Hêtre fendu sur le GR10
Je continue donc dans la hêtraie, en espérant pouvoir quand même accéder au Roc Frausa (ou Roc de France). J'y trouve un hêtre complètement fendu à sa base, juste au bord du chemin. Je finis par retrouver la deuxième intersection GR10/HRP, que j'aurais dû rejoindre depuis la HRP, après le Roc Frausa. Je décide de repartir en arrière sur la HRP cette fois-ci, pour atteindre ce pic. Je manque à nouveau l'intersection et vais trop loin sur le GR10. Décidément... J'ai au moins pu prendre de la hauteur et admirer la vue sur l'Espagne. Vu l'heure, je décide donc de revenir à la dernière intersection pour prendre la HRP, dans le bon sens cette fois, pour aller à Amélie-les-bains. La descente commence dans des débris végétaux, il semble que les fougères aient été débroussaillées. Ce n'est pas très agréable car même si cela a rendu le sol souple, de nombreux petits débris s'invitent dans les chaussures... Puis l'étape, bien que "facile", commence à être un peu longue à mon goût : j'ai de plus en plus chaud, mal aux pieds et aux points d'appui du sac à dos. La végétation méditerranéenne vaut quand même la balade, et contraste avec la pinède de ce matin. C'est donc encore une fois épuisée que j'arrive à Amélie-les-Bains à 16h. Je m'accorde donc un petit plaisir : un bon sirop et une bonne glace en terrasse ! Il fait une trentaine de degrés ici. Vivement la reprise d'altitude ! Je vais ensuite me rafraîchir et détendre mes jambes dans le Tech.

HRP Amélie-les-Bains
Amélie-les-Bains

Étape 4 : Amélie-les-Bains - Batère

"Des chiens, un bon bain"



Etape 4 Trans'pyr Amélie-les-Bains - Batère
Canigou et tour de Batère
Aujourd'hui, une courte étape qui me permettra de récupérer (et de me préparer pour celle de demain). Par courte, le livre entend 5h10 de temps effectif de marche. Le dénivelé n'est quand à lui pas négligeable (1280m D+) mais il ne me pose pas vraiment de difficulté. En revanche, la chaleur en partant d'Amélie est assez pénible. J'ai heureusement pris suffisamment d'eau et en reprends à Montbolo, où j'arrive au bout d'une heure à couper les lacets de la route qui surplombe Amélie-les-Bains. Il y a beaucoup de piste par la suite, ce que je n'apprécie pas trop, mais l'idée de la courte journée compense ce point négatif. La marche sur sentier reprend ensuite peu après le col de la Redoute pour monter raide jusqu'à la crête, et rejoindre les ruines de Formantère. A cet endroit je peux me retourner et profiter de la vue sur le chemin parcouru jusqu'à présent. Une piste me conduit enfin à la tour de Batère, signe de mon arrivée imminente.


Tour Canigou
La tour de Batère
 A 2 km de l'arrivée, des petits cris attirent mon attention : c'était bien une mésange huppée, cette espèce si jolie que je ne croise qu'en montagne. J'adore observer les oiseaux, ce qui peut me faire perdre pas mal de temps en randonnée. Pour cette traversée, j'ai décidé de ne pas m'y attarder. Cette petite mésange est une exception, en somme. Juste avant d'arriver, j'entends des cailles des blés cachées dans les pâtures, grâce à leur cri très typique. 
J'arrive donc au refuge de bonne heure, et y rencontre  plein de personnes sympa et une adorable portée de border collies !
Je les trouve étonnamment calmes pour de jeunes toutous, puis les vois finalement faire les fous une fois l'heure de la sieste terminée (ben oui, je suis arrivée vers 14h !).
Je discute avec mes compagnons de refuge sur la terrasse. Il est très facile d'établir la conversation, on sort ses cartes, on demande qui fait quoi (ou plutôt qui va où et d'où viennent-ils)... Je rencontre ainsi un jeune couple qui termine sa traversée par le GR10 en autonomie. Ils ont leur tente et j'admire les gens qui avancent aussi chargés.La fille a les même chaussures que moi, ce qui est plutôt rassurant, je dois donc être bien équipée... sauf que GR10 et HRP, c'est un peu différent. Mes chaussures sont peut-être un peu trop souples pour la caillasse qui m'attend.


Jeu jeunes border collies
L'adorable portée de Border Collies
Mais l'inquiétude du moment n'est pas là : demain, le livre indique 10h de marche jusqu'au refuge de Mariailles en passant par le Canigou. J'ai vraiment peur de cette distance, vu comme mes pieds me font mal en ce début de traversée (même si ça allait un peu mieux aujourd'hui). Je ne me prive pas de le faire entendre, ouverte à tout avis ou conseil. C'est alors que le très sympathique gardien m'annonce que son collègue, un jeune saisonnier, part demain vers le Canigou en passant par les crêtes (non balisées) du Roc Negre. Je saute alors sur l'occasion : j'avais en effet cherché un raccourci sur cette voie, mais la peur d'aller toute seule sur un itinéraire non balisé sans les indications d'un livre m'avait découragée. Je suis donc ravie, je partirai donc à 6h (gloups) et gagnerai sans doute 2h de marche sur les 10 ! Par ailleurs, je recommande chaudement le gîte de Batère, où l'équipe est vraiment adorable et où vous pourrez bénéficier d'un bain d'eau chaude en plein air !

Paysage crépuscule Pyrénées orientales
Crépuscule et pleine lune depuis les mines de Batère


Étape 5 : Batère - Mariailles

"Journée au top"



Lever de soleil sur mer de nuages
Mer de nuages depuis Cincreus
Aujourd'hui, je me lève donc en vitesse pour être prête à 6h et pouvoir suivre Cho, le saisonnier. Il a fait une douceur incroyable toute la nuit, le départ aux aurores n'est donc pas désagréable. On aperçoit les premières lueurs du jour, un beau lever de soleil nous attend là-haut. Nous disons au-revoir aux chiens qui nous font la fête et attaquons tout de suite la grimpette. Cela monte bien raide mais je suis en forme. Dommage que je sois si chargée, entre le panier pique-nique et le reste. Notre itinéraire alternatif : le col de la Cirère, Le pic Gallinas, la serra del Roc Negre et enfin le pic du Roc Negre. Ensuite il faut descendre vers le nord pour rejoindre le GR10. En attendant, nous nous élevons au-dessus d'une superbe mer de nuages, éclairée par une belle lumière, et profitons du spectacle. Nous poursuivons sur la crête, vraiment pas fréquentée (nous n'avons aperçu que deux randonneurs au loin). La vue est magnifique, j'adore emprunter les sentiers de crêtes et rester le plus en hauteur possible !

 
Roc Negre Pyrénées catalanes
Le Canigou depuis le Roc Negre
Au bout d'un moment, les premiers izards de ma traversée se montrent ! Nous apercevons bientôt le Roc Negre, où il faut mettre un peu les mains pour accéder au sommet. Pour monter, pas de soucis mais la descente s'avère très compliquée. Nous sommes chargés et le sol est très inhospitalier, entre les blocs et la caillasse sur la pente très raide, puis carrément l'éboulis. Cho joue les héros en prenant mon sac, mais s'ouvre légèrement la main en se rattrapant sur une pière tranchante. Heureusement, j'ai ma petite pharmacie. Nous arrivons enfin aux gourgs du Cadi, ces petits étangs où nous nous arrêtons enfin pour manger. Dans mon panier pique-nique, je découvre une barre de céréales faite maison. Quelle gentille attention ! Cho part ensuite de son côté pour l'ascension de la cheminée du Canigou, et moi du mien en descendant vers Mariailles. Pas de regrets d'avoir feinté le Canigou, car, habituée aux randos en Pyrénées catalanes, je l'ai déjà gravi 2 fois.


Gypaète barbu survolant Mariailles
Gypaète barbu et son os !
La descente est tranquille, je croise beaucoup plus de monde maintenant que je suis revenue sur le GR. Cette grosse journée s'est bien passée, elle a quand même été longue (8h de marche environ) mais je n'ai plus trop mal aux pieds. J'arrive donc ravie à Mariailles. Malgré le passage difficile de la descente du Roc Negre, j'ai profité d'un magnifique parcours de crête, toujours sous le soleil, j'ai vu des izards, un lever de soleil sur une superbe mer de nuages... La journée parfaite ! Je sors mon appareil pour photographier le refuge, quand soudain... Un gypaète barbu passe juste au-dessus de moi, à basse altitude et portant dans ses serres un bel os ! Wahou ! Rien ne peut plus m'enlever mon sourire (jusqu'aux oreilles). C'est ma meilleure observation de gypaète et celui-ci a eu la délicatesse d'attendre que je sorte mon appareil pour faire son apparition.


La journée parfaite continue au refuge où l'accueil est super : je déguste une délicieuse bière artisanale locale, rencontre plein de randonneurs sympa, et termine la soirée avec une victoire au scrabble.

Refuge étape 5 HRP GR10
Le refuge de Mariailles