En une phrase, j'encourage tou(te)s les passionné(e)s de montagne un peu expérimenté(e)s à se lancer à leur tour !
Les détails de ce bilan, avec quelques informations pratiques/questions techniques complémentaires :
La HRP, pour qui ?
Il serait inconscient de ma part de dire que ce trek est à la portée de tous. Étant donné que la traversée se déroule parfois sur sentier non balisé voire hors sentier, elle s'adresse aux randonneurs ayant l'expérience du terrain "montagne", avec un bon sens de l'orientation, et sachant passer des difficultés techniques comme des éboulis, pentes raides ou des névés. Même si la technique pose peut-être plus de difficulté que le physique en lui-même, une assez bonne condition physique est bien sûr nécessaire.
Côté matériel, il est difficile de se passer de piolet et/ou crampons, à moins de shunter le col de la Literole et de faire la traversée en juillet-août comme je l'ai fait. A moduler selon les conditions d'enneigement de l'année.
GR10 ou HRP ?
Le GR10 est plus accessible au plus grand nombre, car il ne présente pas toutes les difficultés techniques de la HRP, et c'est un sentier toujours bien balisé. Cependant, la distance et le dénivelé totaux sont plus importants.
Pour ma part, je n'ai aucun regret d'avoir choisi la HRP plutôt que le GR. Pendant mon passage sur le GR, j'étais en manque de haute altitude, de panoramas bluffants, de nature sauvage, de silence absolu... Parcourir les crêtes était vraiment génial. La vue était magnifique et je préférais cela aux forêts présentes plus bas sur le GR, bien qu'elle soient pleines de charme.
Matériel, couchage, nourriture : quel bilan ?
Pour le détail du matériel que j'ai emporté, se reporter à la page dédiée.
Je crois que la seule chose que j'ai oublié de prendre et qui avait son utilité, c'était un gant de toilette. J'ai dû m'en faire prêter à Ayous lorsqu'il faisait très froid et qu'il n'y avait plus d'eau chaude pendant plus de deux jours. J'ai pu tenir deux jours sale et "puante", mais pas trois !
Au final, je suis satisfaite de mon choix de dormir en refuge pour ne pas porter trop de poids. Ainsi, je n'ai emporté qu'un sac à viande. Cela a suffit même dans les refuges non gardés car il y avait des matelas et des couvertures, sauf à l'abri d'Ardané où il manquait les couvertures. Je m'en suis quand même très bien sortie grâce à la couverture de survie.
J'ai très bien dormi dans les refuges, et pas très bien en tente avec mon mince tapis de sol lorsque j'ai bivouaqué en Andorre.
Mes chaussures étaient sans doute un peu souples pour une HRP et se sont bien usées, mais je n'ai pas eu de problème.
Je ne regrette pas d'avoir emporté mon appareil photo bridge, son poids était compensé par le "faible" poids total de mon sac (entre 7 et 13 kg).
Côté nourriture, je rappelle que j'ai alterné dîners en refuge et repas au réchaud, j'ai pris les paniers pique-nique à chaque refuge, et les petit-déjeuners venaient de mon sac la plupart du temps.
Si c'était à refaire je ne reprendrai pas de nouilles chinoises. Certes, elles cuisent rapidement mais les portions individuelles apportent beaucoup trop peu de calories. De même, les portions individuelles de purée lyophilisée ne me suffisaient pas. Mieux vaut miser sur la semoule, les pâtes pour bouillon, les lentilles corail (pour les protéines), et prendre des sachets plus grands de purée. Les repas tout prêts lyophilisés étaient plutôt bons et assez copieux. Il existe également des versions XXL qui sont intéressantes je pense pour les personnes plus corpulentes que moi (autrement dit tout le monde X) ) ! Plus sérieusement, je dirais à partir de 65 kg ?)
Les petit-déjeuners à base de muesli (bien formulé : quaker noix de pécan et noix du Brésil) et de lait en poudre étaient très bien. Les soupes lyophilisées étaient appréciables. Les casse-croûtes de fruits secs, barres énergétiques, chocolat, fromage, et saucisson étaient une bonne idée. Je n'ai pas manqué de nourriture "plaisir", il faut bien penser à en avoir pour un long trek comme celui-là.
Les dîners en refuge étaient copieux et délicieux. Les paniers pique-nique très satisfaisants, mais le pain espagnol est mauvais ! ^^
Le refuge du Mont Roig |
Je crois qu'on peut dire que j'ai été chanceuse globalement niveau conditions météo. J'ai été un peu surprise par le nombre d'orages matinaux (3), mais je n'ai été trempée qu'une ou deux fois sur toute la traversée, les autre fois j'ai pu m'abriter le temps que ça passe, mais surtout il a globalement fait très beau !
Je compte 27 jours de très beau temps, 7 mitigés, 6 nuageux ou de brouillard et 5 avec des précipitations. Plutôt bien non ? Côté températures, j'ai rarement souffert de la chaleur, et il a fait très froid pendant 2-3 jours. Le reste du temps, c'était bien !
A noter que le Pays Basque a été fidèle à sa réputation et m'a offert un peu de brouillard.
Nomadisme, solitude : forme mentale
Comment vit-on mentalement une expérience sportive de pleine nature de 7 semaines, telle que la HRP ?
Pour ma part, les moments difficiles ont été très très rares, et dus uniquement aux intempéries ou aux difficultés techniques.
Je n'étais pas vraiment habituée à marcher seule, mais je l'ai bien vécu dans la mesure où je retrouvais du monde le soir en refuge. En journée en revanche, je ne croisais que très peu de monde. En marchant seule, je me sentais plus en communion avec la nature, tout comme avec moi-même. C'est très apaisant de se laisser perdre dans ses pensées, sans forcément "méditer".
Mais ce que j'ai ressenti de plus fort, c'était la découverte du nomadisme. Tout le corps et l'esprit finissent par s'y accoutumer, le nomadisme devient la normalité, il rythme le quotidien. Le cerveau devient accro ! Quel bonheur de marcher chaque jour vers une nouvelle destination, de se fixer de nouveaux objectifs... Ne rien laisser derrière soi si ce n'est de beaux souvenirs. Marcher, chaque jour ou presque, ne rien faire d'autre : c'était le pied !
Forme physique avant, pendant, après
Avant de partir, j'étais en très bonne condition physique : j'ai toujours été sportive et je pratique la course à pied. Au printemps, je m'étais particulièrement entraînée à la course pour une compétition, puis j'avais fait 2 randonnées en Ariège, en solo, pour me préparer un peu à la HRP. J'avais fait la rando de l'étang d'Artax et le Pic St-Barthélémy.
Je n'étais cependant pas vraiment habituée à porter un sac lourd.
Niveau corpulence, je pesais 44kg (pour 1m55) : déjà pas bien épaisse !
Les 5 premiers jours de la traversée, j'ai eu mal aux pieds. Pas d'ampoules (je n'en ai eu que pour les deux randos de préparation, et je n'ai même pas trop utilisé de crème nox !) mais la sensation d'écrasement au niveau de la plante. Les points d'appui du sac à dos me faisaient mal également. Peu à peu, ces douleurs ont disparu, surtout celles des pieds. Il suffit d'attendre qu'ils fassent de la corne, c'est pour ça que je ne suis pas convaincue après coup par la solution nox !
Les muscles des jambes étaient également bien meurtris les premiers jours mais cela s'est vite estompé.
Le corps s'est accoutumé à l'altitude et j'ai pu porter une grosse charge en Andorre pour soulager ma mère, au bout de 10 jours. De manière générale, le corps a toujours "suivi" dans cette aventure.
Après les passages compliqués en devers en Andorre, j'ai eu une gêne à la cheville et au pied : l'appui me faisait mal en me levant le matin puis je ne le sentais plus vraiment. En fait j'avais la cheville tordue, mais sans entorse. J'ai marché sans problème pendant 19 étapes jusqu'à ce que ma mère ostéo me la remette en place !
En réalisant des enjambées trop grandes et trop énergiques en terrain caillouteux, j'avais ressenti comme une sorte d'élongation à l'arrière du genou dans le Néouvielle. Après les deux très courtes étapes qui ont suivi, je n'avais plus de problème.
A la 20e étape, j'ai ressenti des contractures dans les ischio-jambiers, qui avaient disparu le lendemain après la prise de gélule de magnésium.
J'ai été malade une nuit sans trop savoir pourquoi, j'ai eu très mal au ventre, sans doute une indigestion. Après une nuit et des médicaments, je suis repartie, affaiblie, mais la forme est revenue dans la journée.
Dès la 12e étape, je me suis trouvée très amaigrie : côtes saillantes, cuisses toutes fines... J'avais pourtant l'impression de manger à ma faim. Avec le recul, je pense que mes repas principaux étaient assez caloriques, mais qu'il fallait compenser avec plus d'en-cas encore, car le corps dépense de l'énergie pendant des heures et des heures.
Je n'ai pas de balance et n'ai donc jamais su combien de kilos j'avais perdus, mais sur quelques photos on voit bien que les cuisses sont beaucoup trop maigres par rapport aux mollets qui, eux, peut-être, avaient gagné en muscle. En partant de 44kg, j'étais peut-être passée à 41 ?? Mystère... En tout cas je me suis bien fait plaisir par la suite !
Depuis le Montcalm |
Meilleurs souvenirs, étapes préférées
- Mes meilleurs souvenirs sont la 5e étape, durant laquelle j'ai assisté avec un compagnon de route à un merveilleux lever de soleil, sur une mer de nuage, depuis les crêtes, et qui s'est terminée avec l'observation du gypaète barbu et de son os, à côté du très chouette refuge de Mariailles.
- L'arrivée au col de Mulleres (étape 22) fut un grand moment durant cette traversée. La vue était grandiose, lunaire, désertique, et je me trouvais alors face à l'Aneto, le plus haut sommet de la chaîne. Comme si le symbole ne suffisait pas, ce moment représentait en plus la moitié de ma traversée en nombre d'étapes.
- Une des zones que j'ai préférées était entre Gavarnie et Arrémoulit. La montagne y était pleine de couleurs, très sauvage côté espagnol, il y a eu le passage autour du Vignemale... J'aurais très certainement adoré aussi la zone de l'Aneto à Gavarnie mais je n'ai pas emprunté la HRP sur ce tronçon-là.
Les rares galères ou frayeurs
Si je repense à des moments difficiles, seuls trois me viennent en tête :
- L'étape très technique entre Sorteny et Fourcat (étape 11), en Andorre, avec éboulis, pentes très raides, dévers, et chaos. C'était faisable physiquement, mais très éprouvant mentalement. Préférer la variante par El Serrat.
- Les 4h d'orage et de pluie non-stop au pied du Mont Roig (étape 17), où je ne pouvais pas m'abriter et où je ne savais plus par où aller. Il pleuvait trop pour consulter mon portable ou la carte et j'ai dû attendre, impuissante, que ça s'arrête.
- Le passage du col de Letrero (étape 32), où je perdais toute adhérence dans un goulet très raide et où j'ai cru que j'allais dévaler la pente avec les rochers ! Après coup, j'étais fière d'avoir passé cette épreuve.
Le goulet très raide du col de Letrero |
En premier lieu je dis toujours que je n'ai aucun regret concernant cette traversée. Le choix du parcours, du matériel, la décision de m'être lancée dans l'aventure...
Mais en réfléchissant un peu, je dirais quand même que je regrette un petit peu une chose : c'est de n'avoir pas pris en photo tous les gens sympa avec qui j'ai sympathisé dans les refuges, et sur les sentiers. Ils font aussi partie de mon aventure et n'ont pas eu leur place dans mon appareil photo, tout simplement parce que je n'avais pas le réflexe !